lundi 30 novembre 2009

C'est moche, la démocratie...


Et voilà, c'est fait! A la surprise générale, l'initiative anti.-minarets lancée conjointement par ces grands partis humanistes que sont l'UDC et l'UDF est finalement adoptée. Avec un score confortable de plus de 57% des votants, la Suisse peut se targuer d'avoir clairement tranché en faveur de cette interdiction. Et comme le rappellent souvent les différentes personnalités politiques au moment de commenter les résultats d'une votation,  c'est le peuple, souverain, qui a décidé et l'on ne peut que respecter sa décision. Cette démocratie on-ne-peut-plus directe, dont la Suisse se gausse lorsqu'elle se compare avec ses camarades de la scène internationale, est un bijou qu'il s'agit surtout de ne jamais remettre en cause.







Mais n'aurait-on pas le droit de dire que le peuple s'est trompé, que la bassesse des sentiments exprimés au travers de ce vote ne peut en aucun cas être défendue, même au nom de la sacro-sainte souveraineté du peuple? N'oublions pas qu'Hitler a été en son temps porté à bout de bras par le peuple, Le Pen porté au 2ème tour de la présidentielle française par le peuple ou Haider apparu au premier plan de la scène politique autrichienne par le peuple. Car oui, la principale faiblesse de la démocratie réside dans le fait qu'elle exige du peuple qu'il s'exprime. 

Alors oui, sur le papier, rien de plus beau, rien de plus noble, que la démocratie, pour laquelle tant de personnes se sont battues au travers de siècles. Mais dans les faits, demander à un peuple aisément manipulable, facilement paranoïaque, perméable aux craintes, aux peurs et à l'ignorance, relève parfois du suicide politique. En effet, je reste persuadé qu'une démocratie semi-directe telle qu'elle est appliquée en Suisse est une mauvaise solution; la grande majorité des individus étant incapable de jugement en tout connaissance de cause, que ce soit par la complexité du sujet, ou par l'ignorance des conséquences qu'entrainerait telle ou telle votation. L'individu n'a malheureusement pas les capacités, intellectuelles, morales ou d'analyse pour lui permettre d'appréhender les sujets pour lesquels on lui demande de s'exprimer.

Alors oui, vous me direz que les différents protagonistes en jeu lors d'une votation (opposants et initiants, par exemple) se chargent d'expliquer et d'étayer leur position au cours de la campagne qui précède la votation, ce qui permet au citoyen de se faire une opinion en toute connaissance de cause. Mais justement, c'est là que réside le problème! Car finalement, l'individu est exposé à des messages qui jouent sur la crainte, la peur ou la menace, beaucoup plus efficaces qu'une tentative d'explication, qui d'une part prend du temps, et d'autre part parle moins directement à l'individu lambda, avide de réponses simples et directes. Résultat : des partis nauséabonds, aux porte-paroles pathétiques, profitent de la crédulité citoyenne pour assoir leurs succès électoraux.

Si j’étais politicien et que ma voix avait une quelconque résonance dans les médias, je clamerais aujourd’hui haut et fort que le peuple s’est fourvoyé ce dimanche 29 novembre, et que les 57% d’individus qui ont soutenu cette initiative sont totalement à côté de la plaque et remettrais en cause cette démocratie semi-directe qui est au final qu’une utopie de papier, et un cauchemar de fait. Il faut en finir avec cet angélisme malsain lorsque l'on parle de la démocratie...
 


5 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

    RépondreSupprimer
  2. Entièrement d'accord avec toi. Le pire, c'est quand tu entends les arguments de ceux qui ont soutenu cette ignoble initiative. Tu te rends compte à quel point les gens n'ont RIEN compris et déplacent le problème de fond. Où je bosse, c'est pitoyable, j'ai pu entendre "On a assez d'étrangers, si on autorise les minarets, ils vont venir en masse", "Les musulmans veulent dominer le monde, au moins ils auront compris qu'on veut pas d'eux ici". Bref, tu tombes des nues devant pareille imbécilité et ignorance... Je suis juste dégoutée...

    RépondreSupprimer
  3. Je ne te suis pas, même si je suis révolté qu'une telle initiative ait pu aboutir. Notre image à travers le monde s'en trouve fortement ternie. Néanmoins, le fait qu'un peuple puisse non seulement s'exprimer, mais en plus faire valoir ce qu'il veut à la majorité est un bien précieux que, je crois, seule la Suisse peut se targuer de posséder. C'est un atout que beaucoup de pays nous envient. Bien entendu, ce système n'est pas toujours concluant, mais ce n'est pas parce que, pour une fois, quelque chose de choquant s'est produit qu'il faut remettre en question le système fédéral. Si un jour la Suisse se retrouvait à un rang moyen à l'échelle mondiale quant à la qualité de vie, je me dirais que notre système est tout simplement un système banal: parfois ça marche, parfois ça ne marche pas. Mais quand quantité d'individus à travers le monde envient notre pays et jalouse notre qualité de vie, on ne peut pas remettre en question notre système.

    RépondreSupprimer
  4. Je ne pense pas que l'on peut mettre en parallèle la qualité de vie en Suisse et la démocratie semi-directe... actuellement, si tu prends le PIB/habitant de la Suisse comme base d'une qualité de vie élevée, celui ci est principalement dû au fait que la Suisse s'est économiquement placée sur des secteurs (services, tourisme et industrie) à haute valeur ajoutée. Toutefois, la richesse de la Suisse est tout relative, et il ne faut pas se leurrer, cette opulence tient du mythe, construit sur un passé qui n'est plus. Depuis la fin des années 80, notre pays est le pays du monde occidental pour lequel la croissance du PIB a été la plus faible, et nous avons perdu notre place de leader depuis longtemps... on peut presque parler de stagnation, puisque depuis 1973 la croissance du PIB suisse atteint difficilement les 1,5% en moyenne... Donc je m'égare, mais la Suisse ne doit pas sa richesse à son système politique, puisqu'elle n'est en 2008 que 15ème du classement PIB/ habitant, derrière des pays aussi politiquement variés que Singapour, le Koweit, les USA, le Luxembourg ou la Norvège...

    RépondreSupprimer
  5. En effet, c'est vrai que je n'ai pas été clair. Le but de mon message était simplement de dire que, non seulement parce que c'est une chance de pouvoir s'exprimer, mais encore par égard aux autres nations qui envient notre système d'expression, on ne peut se permettre de mettre en doute ce système qui, même s'il peut être décevant comme dimanche passé, est une chance.

    RépondreSupprimer